Les contemporains ont décrit la rue Saint-Honoré comme une rue "riche, encombrée, populeuse et bruyante". Elle a pris plus encore de l'importante pendant la
révolution, à cause de sa proximité avec le Manège et les Tuileries où ont siégé les différentes assemblées, et avec le Club des Jacobins qui donnait sur la
rue. Enfin, c'était aussi le chemin de passage des charettes de condamnées, lorsque les exécutions avaient lieu place de la Révolution (Concorde), et comme on le
sait, le 10 thermidor c'était le cas...
Il y avait sur cette rue, en face du Club des Jacobins, l'hôtel des "Tuileries" où Thérèse Gellé, après avoir quitté son mari, est descendue en juillet 1793. Saint-Just
est-il venu la voir là-bas? Ce n'est pas impossible.
Mais l'importance principale de cette rue pour Saint-Just était que depuis l'été 1791, Maximilien Robespierre y habitait au N° 366 (actuellement n°400 comme
une plaque commémorative nous l'indique), chez le menuisier Maurice Duplay et sa famille. Il y était logé dans une petite chambre donnant sur la cour, au 1er étage,
au-dessus du grand hangar qui précédait l'atelier du menuisier. Le décor de sa chambre était simplissime: des rideaux de damas bleu à fleur blanches, un lit, un bureau près
de la fenêtre, trois chaises de paille et une bibliothèque contenant ses livres. C'est ici qu'il rédigeait ses discours, et c'est ici qu'il recevait ses amis
(les visiteurs éventuels, s'ils étaient reçus, l'étaient au petit salon des Duplay). Interrogés après le 9 thermidor, les habitants de la maison ont répondu
que Saint-Just dînait rarement à la table des Duplay, mais qu'"il venait fréquemment chez Robespierre et montait dans son cabinet sans communiquer avec personne".
Même s'il n'appréciait visiblement pas la cuisine de la Citoyenne Duplay mère, Saint-Just était reçu à son salon où elle faisait des réceptions amicales jeudi soir.
Garni de meubles en acajou recouverts de velours rouge de Hollande, le salon a vu défiler, en fonction des époques, Pétion, Fouché, Danton, Desmoulins et Madame,
pour ne compter à la fin que des vrais amis: Buonarotti, Couthon, Lebas et Saint-Just lorsque ses rares loisirs le lui permettaient. Il y avait dans la pièce un clavecin,
pour accompagner les chants italiens de Buonarotti, et le silence s'installait lorsque Robespierre leur faisait la lecture de Racine, Corneille ou Rousseau...
Que reste-t-il aujourd'hui de la maison Duplay? Elle était fortement modifiée depuis, tout comme la rue d'ailleurs. La menuiserie a disparu, le bâtiment lui-même
est surélevé de plusieurs étages. La cour Duplay bien claire, a laissé place à une courette exigue et sombre d'aujourd'hui. A la place de la maison habitée par
la famille Duplay, il y a aujourd'hui un immeuble abritant au rez-de-chaussée un salon de thé donnant sur la cour. Il y avait ici en 1989 encore, un restaurant
à l'enseigne de Robespierre, disparu depuis. Quant à la chambre où habitait Maximilien, elle existe toujours, paraît-il...
La cour Duplay à l'époque de Robespierre |
La maison sur une gravure représentant l'arrestation de Cécile Renaud |
La cour actuelle de l'immeuble |